Nous sommes attirés par cette question depuis longtemps. Quel est l’impact de l’esprit sur le corps ? Que savons-nous de ce qui se passe entre l’esprit, le cerveau et le corps ? Quelle est l’influence du psychisme sur le corps ?
Patrick Clervoy a toujours été intéressé par ce sujet, déjà jeune étudiant en médecine, cette question l’a fasciné. Une longue expérience, un travail sur le terrain militaire, et la poursuite de l’exercice de sa profession en cabinet, lui ont permis de poursuivre ses recherches et ses passions. Il vient nous parler ce matin de son livre et nous permet de rentrer dans un monde fascinant.
Mais revenons au début, dans ce livre fabuleux, on en apprend encore et toujours plus ! Patrick Clervoy nous fait voyager dans le temps, repartir aux siècles passés, et nous parle de miracles ? Comment un médecin peut-il parler de miracles ?... Il nous raconte pourquoi ils étaient plus fréquents par le passé ? Ce qui se mettait en place dans l’esprit pour que le miracle ait lieu ? Était-ce la foi ? la conviction, l’auto suggestion ?
Il aborde des rivages que la médecine a longtemps évité, parce qu’elle estimait que cela manquait de rationalité. Médecin lui-même et psychiatre, tout en se penchant sur notre passé, il ose apporter un regard renouvelé, étayé par les résultats obtenus grâce aux technologies actuelles.
Car ce qui est nouveau, c’est qu’à l’heure actuelle l’imagerie et les progrès de la médecine mettent en évidence les relations entre les modifications au niveau du cerveau et l’impact sur le corps. Ce qui était uniquement observable, et parfois remis en question par le passé, est actuellement vérifiable. On observe comment une action sur le corps va stimuler un neurone, à quel moment, comment, et quelles seront les réactions en chaîne.
Comment les émotions, le stress, les chocs modifient nos neurones, nos connexions, et de ce fait, ont une action sur le corps. L’émotion transmise par les neurones va stimuler une partie du cerveau, qui elle, va donner une réponse physique, bien visible. Cette modification physique ne se fera pas n’importe où, ou n’importe comment !
Un exemple que tout le monde a déjà observé… rougir suite à une émotion. La partie du corps qui va rougir sera toujours la même pour une personne, mais différente d’une personne à l’autre ! On rougit aux oreilles, aux joues, au cou ! Que s’est-il passé ? Que veut dire le corps ? Par quel biais est-il passé pour exprimer physiquement un ressenti ? La peau, nous raconte beaucoup de choses. (Collection 5 - La peau, le toucher et la santé)
Comment une émotion peut-elle déclencher une maladie ? Il nous donne l’exemple du zona. La personne est un porteur sain de l’herpès (qui reste en sommeil), mais un choc émotionnel peut activer les ganglions nerveux et le rameau nerveux va s’activer. Il y aura eu une interaction entre le psychisme et le corps.
Il nous parle du vitalisme ! On se dit que c’est vieux ! On a presque envie de se moquer, et pourtant ce médecin du XIXème siècle Charles Lasègue était déjà un avant-gardiste. Avec une approche très actuelle, puisqu’il est question de faire appel aux énergies de guérison du patient.
Faire appel à sa capacité à mobiliser ses énergies. Évidemment, il semble simple d’énoncer de telles vérités, et ceux qui n’arrivent pas à les mobiliser ces énergies de guérison ? ou si peu ? Faut-il les accabler ? Les culpabiliser ? De nouveau, l’égalité sur terre n’existe pas pour répondre à la maladie. Le matériel génétique de chacun, est plus ou moins apte à faire face aux difficultés et à contacter ses propres ressources. Notre ADN va déterminer notre manière de répondre à la maladie. Mais il est toujours possible de stimuler, de transformer et d’augmenter notre capacité à nous défendre.
Ceci explique que des personnes en contact avec des malades contagieux ne développent pas forcément la maladie. Quelles sont les prédispositions génétiques, les prédispositions psychiques pour lutter autrement ?
« Le vitalisme, c’est la première énergie libérée par ce que nous avons dans l’ADN » citation de Patrick Clervoy.
De même, face à cette inégalité, la douleur ne sera pas perçue de la même manière suivant la personne. Nos capteurs enverront l’information par le même biais, mais ce qui sera différent ce sera notre sensibilité et notre capacité à activer la zone de douleur, ou pas, dans le cerveau.
Une autre expérience va nous montrer combien notre cerveau détermine notre appréhension de la douleur. La fameuse expérience, de la main en caoutchouc, est pour cela extraordinaire. Je ne peux faire l’impasse de son descriptif tant elle corrobore et résume à elle seule l’impact de nos croyances, de notre esprit sur notre cerveau et sur notre corps.
La personne a ses deux bras devant elle, posés sur une table. On lui cache la main gauche avec une plaque de métal et on met à côté une main en caoutchouc qui ressemble à sa main. Le tout camouflé par un drap.
Le soignant va passer simultanément un pinceau aux mêmes endroits de la fausse main et de la main réelle. Très rapidement le patient va intégrer la main en caoutchouc comme étant la sienne. Il va prêter à la main en caoutchouc les sensations qu’il a dans l’autre main.
Le soignant prend alors une aiguille et pique la main en caoutchouc. Le sujet retire sa main, qu’il croit avoir été piquée, en poussant un cri. Il se la frotte comme s’il avait mal. Il a ressenti la douleur.
Ce qui explique que notre croyance peut activer ou désactiver une douleur. Que médicalement, même si rien ne permet d’évaluer l’intensité d’une douleur, celle-ci peut être fortement ressentie par la personne malade. Cette personne aura besoin d’aide.
La nécessité de la prise en charge du patient dans sa globalité va être rassurante et permettre une meilleure mobilisation de ses forces de guérison.
Au-delà de tout ce que je viens de dire le plus beau reste à venir ! Car s’il a été constaté que les émotions fortes et négatives peuvent avoir des conséquences graves sur la santé. (Dr Clervoy donne l’exemple d’un enfant de dix ans qui perd ses cheveux en une nuit, après avoir été attaqué par un chien). Nous sommes touchés lorsqu’il nous parle du pouvoir de l’empathie et de la gentillesse, dont l’impact est considérable sur l’esprit et sur les sensations du corps. Des attitudes qui peuvent à elles seules diminuer la douleur. Une émotion positive peut donc avoir un effet aussi puissant qu’une émotion négative.
N’est-ce pas fantastique de savoir que nous sommes « sujets soumis à » puisque porteur d’un ADN et d’une attitude psychique et, en même temps acteurs et actifs de tout ce qui nous arrive. Que par notre attitude, nous pouvons nous aider nous-mêmes et aider aussi les autres à se sentir mieux.
Il nous explique comment l’empathie, la présence à l’autre permettent de diminuer la douleur et d’augmenter le processus de guérison. Des expériences faites à l’Institut Pasteur à Paris, confirment que la douleur est mieux supportée lorsqu’un couple se tient la main. La présence empathique et la connexion des deux cerveaux en serait l’explication.
Les processus de guérison peuvent être augmentés par l’attitude de chacun face à la maladie. Les gestes, mais aussi la parole, peuvent construire ou détruire, provoquant des réactions physiques plus ou moins importantes.
La parole, au centre de la relation, peut faire basculer vers une meilleure guérison. Ces expériences, confirment ce que disait déjà Hippocrate :
« La nature du corps est le commencement du raisonnement médical ».
Hippocrate ! Encore et toujours lui ! Il reste encore très moderne malgré les siècles. En deux mots, l’observation d’un corps permet de comprendre les processus de guérison et par là même d’aider un patient.
Comme il est heureux de constater que rien n’est figé et qu’en s’en donnant les moyens on peut tout transformer et tout améliorer. Comme disait Platon :
« La pratique du soin est une pratique de réconciliation »
Se réconcilier avec soi-même, c’est mettre toute son énergie vers le retour à la santé.
Actuellement, l’acupuncture, la pleine conscience… pour ne citer qu’eux, sont entrés dans les hôpitaux et contribuent à mettre en mouvement les processus de guérison de chacun et à stimuler l’activation de ceux qui sont « génétiquement » moins bien lotis. Notre corps peut aussi avoir un impact sur notre cerveau, un impact bénéfique sur la santé.
Avec ce dernier exemple, nous restons admiratifs face aux miracles de la vie. Le chirurgien va rapprocher les bords de la plaie mais la cicatrisation et la guérison se feront grâce à la force vitale du patient. Quelle est cette énergie, qui peut nous guérir si elle est mobilisée ou nous rendre malade si elle ne l’est pas ?
Je ne peux que vous encourager à écouter l’émission et surtout à lire ce livre qui m’a enthousiasmée.
© Alice Duruz - 2019
Source :
Dr. Patrick Clervoy (auteur de nombreux ouvrages sur les traumatismes psychiques).
« Le pouvoir de l’esprit sur le corps » Ed. Odile Jacob
Emission « la tête au carré » du 19 avril 2018 animée par Mathieu Vidard