Revenons à la peau, cette délaissée de nos sociétés. Et la question se pose. Quel respect avons-nous pour notre peau ? Comment la soignons-nous ? Arrivons-nous à nous hydrater la peau ? A prendre du temps pour elle ?
Prendre soin de sa peau, c’est déjà oser et accepter de se faire du bien. Du bien, parce qu’on se touche, parce qu’on respecte son besoin de douceur, parce qu’on a fait une dépense et acheté une crème pour mettre du baume sur des parties du corps, souvent invisibles aux yeux des autres, parce qu’on « dépense » du temps pour soi.
Mais notre attitude même, au moment où nous nous crémons, en dit long sur notre rapport au corps, mais aussi sur notre rapport à la vie. Que pensons-nous lorsque nous mettons une crème ou une huile sur notre corps ou notre visage ? Quelle est notre attitude intérieure ? Que nous disons- nous ?
- C’est bien car ma peau est sèche et ça tire
- C’est bien parce que je ne veux pas vieillir
- Ce n’est pas bien parce qu’il faut s’occuper des autres avant soi-même
- C’est de l’égoïsme car ça prend du temps
- C’est nourrir l’égo et ne s’occuper que des apparences
- Le soir je n’y arrive plus ! Je suis trop fatiguée
- Le soir je préfère m’occuper d’autre chose ou de l’autre
- Je n’aime pas me toucher
- Je ne m’aime pas tout simplement
- Le corps fait horreur
- Le corps n’est pas important, il est une apparence et je ne veux pas cautionner un monde où seul l’apparence compte
- Je suis prête à maltraiter mon corps… pourvu qu’il corresponde à mes rêves
- Je me sens coupable si je prends trop soin de moi
- C’est une attitude trop féminine !... (Les hommes auraient-ils des peaux d’éléphants…)
- Je ne veux plus me mettre de crème et m’occuper de moi car je suis seul(e), je me sens abandonné(e)
- Je ne veux plus prendre soin de moi car je ne peux pas me faire du bien
- Je déprime, je refuse de me faire du bien, plus rien ne m’intéresse
- J’ai perdu l’être cher et « moi » ne m’intéresse plus
Il faut souvent être malade pour prendre soin de sa peau. Et pourtant, si l’on interroge la langue française, que d’expressions qui nous parlent de peau et expriment toute son importance ! Lui faire la peau, à fleur de peau, l’avoir dans la peau…
Toute notre attitude vis-à-vis de notre corps, parle de ce que nous ressentons à l’intérieur de nous. La parole révèle ce que nous voulons dire de nous, la peau nous dévoile, et ne cache rien. La peau peut être fine, mince, tendue, épaisse, grasse, douce, rugueuse, molle, spongieuse, grise, pâle, jaunâtre, dégager des odeurs différentes selon notre alimentation, notre état de santé, notre pH, notre acidité, elle peut frissonner, se glacer, rougir... Elle est très révélatrice de qui nous sommes. Elle est finalement plus bavarde que ne le sont parfois les mots. Les mots peuvent nous leurrer mais la peau est, à elle seule, un livre ouvert.
La peau a un rôle dans la synthèse de la vitamine D, contribuant au bon fonctionnement du système immunitaire. Elle est un lieu incroyable d’échanges, et envoie des stimulis qui vont directement au cerveau. Si on sectionne la peau sur une surface d’un euro, on a quelques millions de cellules, des centaines de glandes sudoripares, cinquante terminaisons nerveuses, un mètre de vaisseau sanguin. La naissance du système lymphatique se fait au niveau de la peau. Les capillaires lymphatiques y sont très denses.
N’est-ce pas incroyable ? Il n’est pas alors étonnant que le moindre stimuli donne une information au cerveau qui répondra de la meilleure façon qui soit. Au-delà du fait que la peau a de nombreuses terminaisons nerveuses, il est essentiel de savoir que notre peau et notre système nerveux sont issus des mêmes cellules embryonnaires. Dans l’embryon, le système nerveux central se développe au niveau interne, ensuite le reste du feuillet recouvre l’embryon et devient la peau. Ce sont des informations anatomiques, elles vous paraissent peut-être anodines ? Pourtant elles vont expliquer bon nombre de problèmes et de réactions, permettre de comprendre pourquoi les problèmes de nervosité vont avoir un impact sur la peau et se révéler ou s’exprimer par des maladies telles que le psoriasis, l’eczéma, l’urticaire... pour les plus connues.
De là, à dire que tous les problèmes de peau pourraient avoir un lien avec le système nerveux… La question est posée. Et si on la retourne cette question ? Imaginons un adolescent en plein bouleversement hormonal, qui se voit le visage ravagé par l’acné, en toute logique on pourrait imaginer son système nerveux malmené. Nous savons que les hormones jouent un grand rôle dans nos humeurs, dans la déprime, dans les excès de l’adolescent. Mais sa fragilité nerveuse, ne pourrait-elle pas aussi être une conséquence et même être en lien avec la perception visuelle de sa peau ? Cette aversion de lui-même pourrait aussi expliquer son refus de se laisser approcher, de se laisser toucher, son rejet de lui-même. Ne serait-ce pas son problème hormonal et visible sur sa peau qui fragiliserait son système nerveux et le rendrait encore plus sensible et irritable ?
La peau va être un régulateur thermique qui va nous permettre une adaptation constante au milieu extérieur. Avec quelques degrés de plus dans le corps, il serait impossible de vivre. Elle sera capable de provoquer des frissons pour nous réchauffer etc… Elle va également sécréter une hormone immunitaire comparable à l’hormone du thymus qui produits les lymphocytes T. Ces lymphocytes T sont très importants dans notre immunité, car ils combattent les cellules cancéreuses et détruisent les bactéries. La peau nous protège en permanence, puisque les hormones sécrétées par la peau sont aussi importantes que le système immunitaire.
La peau va être un grand révélateur de notre état de santé. Sa couleur, sa texture, sa tonicité, son odeur seront de bons indicateurs. Elle est le premier révélateur de notre personnalité, de notre façon de vivre, de nous nourrir, mais également de notre manière d’être face aux évènements de la vie. Elle dit tout de nous, et notre visage reste notre plus belle carte de visite. La peau est aussi un révélateur.
La peau et notre état de santé ! On approche de notre but, le massage ! Mais avec moi, c’est armé de patience qu’il faut se munir… Ce n’est pas encore aujourd’hui que je parlerais du massage. Vous allez m’en vouloir, je vous fais languir. Mais si vous me connaissez et me lisez depuis quelques temps, vous savez combien j’aime vous prendre par la main. C’est tellement agréable de se laisser prendre par la main ! On est guidé, en sécurité, on se laisse porter sans se poser de questions et sans rien faire. C’est le retour à l’enfance, à la nonchalance, au plaisir de l’insouciance, de se laisser porter dans la légèreté. Voilà le projet, vous prendre par la main. Mais avant de vous parler du massage et de ses bienfaits, des répercussions sur le corps, le tout étayé par des études scientifiques, il nous faudra aborder le thème du toucher, prendre un peu de temps pour nous observer dans notre quotidien et enfin clore la thématique avec l’article sur le massage.
© Alice Duruz - 2019
Source :
« Les bienfaits du toucher » Tiffany Field – Petite Biblio Payot Santé
Tiffany Field est psychologue, dirige le Touch Research Institute à la Faculté de médecine de l’Université de Miami